Je crois que cette rubrique a besoin d'un peu de nouveauté ; je vous propose donc quelques sonnets sans prétention écrits en cours le plus souvent (certains alexandrins sont faux, mais je ne suis pas Rimbaud...)
ENNUI
[color=black]Hors d’un masque d’argent défait par la grimace
Surgit, vulgaire et crâne, agression aiguë
Cette voix qui m’assomme à force de ciguë,
Insidieux poison, orgueilleuse limace.
Captive de murs nus, encerclée de rapaces,
Ma pauvre âme, sous la lumière sordiguë
S’épouvante aveuglée par la honte ambiguë
Des marionnettes mues d’ambitions vivaces.
À quoi bon résister ? Déjà je m’abandonne
Et m’engouffre, croquée par la glauque Gorgone
Je me recroqueville, médusée par l’Ennui.
Mais alors que je cède au feu qui m’empoisonne
Une brusque clameur jusqu’en mon cœur résonne
C’est l’alarme, le cri, salvateur hallali.
[color:c83b=black:c83b]Automne 2006, pendant les cours de philosophie
* * *
SONNETS DE L'EXIL (Thème imposé)
I.
Je n’irai pas à Rome, en dépit de ces pages
Qui, tombant des livrets, m’invitent au voyage
Je ne verrai rien d’autre du secret Paris
Qu’une bibliothèque et des métros de nuit
Je ne sentirai plus la bruine sur la plage
Qui me berçait jadis, du temps de mon jeune âge
Je n’écouterai plus les cris des goélands
Que dans l'anxiété de rêves épuisants
Je ne connaîtrai plus l’oisiveté volage
Je ne sentirai plus le vent sur mon visage
Ni ne contemplerai les falaises hardies
Mais c’est avec plaisir que dans le sarcophage
De ce libre labeur je fais mon ermitage
Exilée loin de Brest, mais près de tant d’amis
II.
VENT D’OUEST.
Heureux sont les oisifs aux journées impromptues
Qui s’adonnent, rêveurs, à de vains bâillements !
Mais je ne connaîtrai aucun désœuvrement,
Et sans répit, je vogue en des mers inconnues.
Si tentants sont les mots aux mélodies aiguës
M’invitant en des lieux inouïs et charmants !…
Saisissant son doux chant, comme il est déchirant
De délaisser la page implorant d’être lue !
Quand sentirai-je enfin le sel de l’océan ?
Quand donc me grisera le vol des goélands ?
Quand m’abandonnerai-je aux fabuleux voyages ?
Mais il me faut cesser mes caprices d’antan :
Si je demeure ici, c’est délibérément,
Et le ciel de Paris vaut bien les coquillages…
Février 2006, Brest et Paris.